The Needles est un site d’escalade situé dans la Sierra Nevada, au sud de Sequoia National Parc. C’est un site assez isolé dans la Sierra et positionné plutôt loin des villes, il faut donc y aller avec ses réserves d’eau et de nourriture. Nous n’avions pas entendu parler de ce site avant d’aller aux États-Unis mais après de bonnes recommandations, nous avons décidé d’aller y jeter un coup d’œil. C’est devenu notre coup de cœur de la Californie. Cela montre l’importance d’avoir un peu de flexibilité pendant le voyage.
La qualité du granite et la beauté du site sont supérieurs. Beaucoup de voies se terminent au sommet de jolies tours. Une des caractéristiques des Needles est son lichen de couleur jaune fluo qui couvre les parois des tours. Les ouvreurs ont trouvé l’atmosphère du site tellement magique qu’il ont donné aux tours le nom de personnages fantastiques comme la sorcière, le sorcier, le magicien, le charlatan…

La marche d’approche est longue (1h15 – 1h45) mais pas difficile (il y a peu de dénivelé) et si on laisse le matériel d’escalade proche des voies, comme le font traditionnellement les grimpeurs, l’effort est bien amoindrit. Il n’y a pas de camping officiel mais le camping sauvage est autorisé et établi pour les grimpeurs. Il y a des toilettes, ainsi les commodités sont les mêmes que la plupart des campings aux États-Unis.
Comme alternative au camping, il y a un Bed and Breakfast à Ponderosa. Nous avons hésité à y passer une nuit, comme les premières soirées que nous avons passées aux Needles étaient assez froides. Mais quand nous avons appris que la chambre était au dessus de cents dollars, petit déjeuné non compris (oui c’est un Bed and Breakfast sans breakfast!), nous nous sommes dit que une soupe et nos doudounes nous permettraient quand même de passer de bonnes soirées.
Nous avons trouvé qu’il y avait peu de grimpeurs, ce qui doit s’expliquer par l’isolement du site et par l’absence d’un bon topo pendant longtemps. Nous avons vu entre une et cinq autres cordées sur le site, ce qui est presque rien vu toutes les tours et voies qu’il y a.
Sur les 5 jours que nous avons passé aux Needles, nous avons grimpé au secteur Main Notch et autour de ce secteur ainsi qu’une journée à Dome Rock, un site proche des Needles. Voici un aperçu de nos escalades et nos recommandations.
Needles
Igor Unchained (5.9, 3 longueurs)
La plus classique du site? C’est une fissure non interrompue jusqu’au sommet de la voie. On trouve beaucoup de bons coincements de mains pendant environ 2/3 de la voie. Le début de la troisième longueur, un peu déversant, se grimpe sur des bacs inattendus et la longueur se termine avec une fissure de doigts dont l’inclinaison devient de plus en plus dalleuse lorsque l’on se rapproche du sommet. En général, dans les Needles, mais surtout dans cette voie, le granite est le plus pur, solide et sculpté que nous avons trouvé.
Airy Interlude (10a, 3 longueurs)
C’est une autre voie majeure mais avec un début un peu moins convaincant que dans Igor Unchained. Cependant, la deuxième longueur fait la réputation de cette voie. Après un dièdre vertical, c’est une fissure de main qui traverse diagonalement un mur lisse. Elle se voit de loin et la grimpe est aussi bien qu’elle a l’air. La voie rejoint et se termine par Igor Unchained.
Spooky (5.9, 2 longueurs)
Estelle a enchaîné sa première voie en tête dans les Needles avec la première longueur de Spooky, une fissure de main dans un corner (un coin). Pour la deuxième longueur, Michel c’est battu avec l’offwidth, avant de profiter du granite très sculpté. Nous avions l’impression de grimper sur des colonnes.
The Lady of the Needles (5.7, 1 longueur)
C’est une longueur courte qui permet de grimper une petite tour.

The Howling (10a, 2 longueurs)
C’est la voie la plus abordable pour faire le Warlock, à notre avis, le plus beau sommet des Needles. La première longueur est beaucoup mieux que l’on dirait. Elle offre des possibilités de bons coincements malgré son apparence de fissure large. Le style change complétement dans la deuxième longueur. C’est une escalade de face assez engagée et aérienne. Le mur s’aplatit de façon régulière et tout d’un coup, on arrive au sommet en marchant. Ce sommet invite le grimpeur à s’y poser un moment et profiter de sa position. L’endroit est vraiment magique.
Thin Ice (10b, 2 longueurs)
C’est la voie la plus difficile et la plus mémorable de notre court séjour aux Needles. Comme les deux longueurs sont très longues (50 et 60 mètres) et soutenues ont a l’impression d’en avoir grimpé le double en arrivant au sommet.
Dans la première longueur, une fissure indique le passage, et pleins de failles à côté rendent la grimpe fluide et intéressante.Malheureusement, Michel c’est battu longtemps pour poser un coinceur et finalement il a glissé. Cela lui a coûté l’enchaînement, en rétrospective, il aurait juste dû avancer. C’est le dilemme classique du trad où il faut toujours trouver le compromis entre sécurité et efficacité de la grimpe.
Pendant que le leader assure le deuxième de cordé, il a le temps de regarder le début de la deuxième longueur et de se demander comment on grimpe un truc comme ça. Le topo décrit se passage comme V-slot avec une fissure à l’intérieur (une fissure au fond d’un V). Nous avons grimpé avec une main dans la fissure et le reste du corps c’est engagé dans des frottements rythmiques telle une larve qui voudrait sortir d’un tube. Ça a marché pour monter mais pour enchainer il nous aurait fallu un peu plus de finesse et de technique. C’était une libération de sortir de ce dièdre et de se retrouver sur une bonne fissure de main. La sortie passe dans un dièdre dalleux et est devenu le challenge ultime pour Michel qui avait déjà posé tous ces coinceurs et qui a dû gérer le tirage.
The lifeboat (11a, 2 longueurs)
Après une première longueur facile et moche, c’est une escalade toute en finesse, équipée avec quelques spits espacés. Ce n’est pas notre voie préférée mais nous étions content d’enchaîner des voies dans des styles différents.
Yellow Brick Road (5.9, 2 longeurs)

Grimper la tour, the Wizard est l’occasion unique de se retrouver sur la tête de Darth Vader (Dark Vador 😉 pour les français). La ressemblance de cette tour avec le personnage iconique de Star Wars est incroyable. On peut bien l’apprécier de la tour Charlatan.
Pour cela, nous avons grimpé la voie Yellow Brick Road. La voie n’est pas devenue notre coup de cœur. La traversée dans l’arbre du début, la fissure large (Camalot n°5) et le dièdre de la deuxième longueur où il nous manquait des petits friends n’étaient pas des plus agréables. Mais tous les désagréments étaient immédiatement oubliés, dès que nous avons senti la force avec nous sur le sommet.
Pour la petite histoire, dans la fissure large, on peut observer encore la présence d’une bouteille d’huile à salade. Elle a été utilisée pour décoincé le genou d’un pauvre grimpeur bloqué dans cette fissure. Apparemment la force n’était pas avec lui ce jour là.
Dome Rock
Comme il est à côté de la route, sur le chemin pour aller aux Needles et avec une marche d’approche très courte et facile, il est intéressant d’aller faire un tour à Dome Rock si on grimpe dans le coin.
Autour du parking pour Dome Rock se trouvent plusieurs places de camping sauvage.
Mais le site n’a pas seulement des avantages pratiques, les deux voies que nous avons grimpé sont aussi exceptionnelles et cela vaut le coup de s’y arrêter.
Anti-Jello Crack (10a, 4 longueurs)
Nous allons surement nous rappeler de la 2ème longueur de cette voie. C’est une super fissure à doigts oblique qui demande une bonne technique de pied. L’inclinaison dalle du mur a l’avantage qu’il ne faut pas trop tirer lors des coincements de doigts. La 3ème longueur est d’une haute qualité également avec son dièdre dont le passage clé est protégé par les plus petits des friends et coinceurs.

Windjammer (10a, 3 longueurs)
Une des voies les plus spéciales du voyage.
Le début change déjà complétement de ce que l’on est habitué, mais nous avons accepté le défi! Pour protéger le début où se trouve le passage clé, il faut jeter la corde autour d’un grand knob déjà assez haut (6 ou 7 mètres). Si on maitrise la technique du lassot, c’est plus facile mais comme nous n’avons pas de sang cowboy dans nos veines, nous avons mis une dizaines d’essais avant d’y arriver.
On grimpe ensuite les premiers mètres en moule. Doucement, car on a pas envie de faire tomber la corde du knob. La suite de la longueur consiste d’une longue diagonale où le challenge est de trouver son chemin dans l’océan des knobs géants. Nous avons rassemblé toutes les sangles, grandes ou petites, que nous avions avec nous pour pouvoir protéger les 45 mètres de grimpe sur knobs. A notre grande satisfaction toutes les sangles sont restées sur place.
La deuxième longueur continue brièvement sur les derniers knobs. Puis, on arrive à une fissure de taille variée qui se protège parfaitement avec un jeu de friends. A la fin de la fissure, on se retrouve tout à coup perdu au milieu du mur. Le passage suivant n’est pas évident et il n’y a pas d’option pour mettre de la protection. Il faut alors partir vers la gauche et s’engager dans un grand runout (environ 10m jusqu’au relais et après 7m il y a un très vieux spit qu’on voit pas du bas). Le plaisir remplace la peur dès qu’on se rend compte de la qualité du rocher. L’eau a formé un corridor d’un mètre avec des milliers des petits trous et réglettes. Incroyable!

Sequoia et Kings Canyon National Parks
Séquoia National Park et Kings Canyon National Parks sont deux parcs nationaux différents mais situés côte à côte et gérés en commun.
Une route nord-sud les traverse. De cette route, il est possible de rejoindre les différents points d’intérêts qu’offrent les deux parcs.
Nous avons passés un jour et demi à visiter ces deux parcs. Le premier jour nous sommes allés admirer les séquoias géants et avons fait quelques ballades. Le deuxième jour, nous avons parcouru la Scenic Drive de Kings Canyon.
Sequoia et Kings Canyon National parks ne s’accèdent que par l’ouest de la Sierra Nevada.
Des Needles, il faut compter au moins 2 heures et 150 km, bien qu’à vol d’oiseaux les sites sont très proches.
L’intérêt principal qui mène à aller découvrir ces parcs sont les séquoias géants qui détiennent le record des plus grands arbres du monde en terme de volume. Le record de hauteur est détenu par un séquoia à feuilles d’if (redwood en anglais) qui se trouve aussi en Californie. Le record de largeur est détenu par un cyprès situé au Mexique.
Sequoia National Park
La partie qui se visite en voiture et où on peut admirer les plus grands des Séquoias géants n’est qu’une petite partie du parc mais celui-ci est en fait très étendu et des randonnées de plusieurs jours dont le John Muir Trail où le trail jusqu’au Mount Whitney qui permettent de découvrir une nature vierge non accessibles en véhicules motorisés.
Échauffez bien votre cou avant d’entrer car, dans ce parc, on passe pas mal de temps à ce tordre le cou pour observer la cime des arbres.

Les 2 masquotes des parcs sont le General Sherman et le General Grant qui sont les deux plus grands arbres du monde en terme de volume. Les autres proportions sont aussi impressionnantes (84 m de haut et 11 m de diamètre pour General Sherman, 82 m de haut et 12 m de diamètre pour General Grant).
Tout le monde vient à Sequoia National Park pour les admirer. Mais de nombreux petits sentiers permettent d’aller marcher au milieu des colonies de séquoia géants loin de la foule.

Quelques chemins permettent d’avoir de belles vues d’ensemble du parc. Le Moro Rock Trail permet de monter sur ce grand bloc de granite et d’avoir une vue panoramique sur la zone sud du parc et sur les montagnes de la Sierra Nevada.
Le Buena Vista Peak est une randonnée un peu plus longue mais facile et où les randonneurs se font rares. Du sommet, on a une vue à 360° sur Kings Canyon et le nord de Sequoia National Park.

Le Log Tunnel, un tunnel creusé dans le tronc d’un séquoia géant tombé à terre et que l’on peut traverser avec la voiture est à ne pas manquer.
Si on continue la route de Log Tunnel, on arrive à Creasent Meadow, une prairie humide bordée de quelques beaux séquoias.
Kings Canyon est un parc morcelé. Entre la partie où se trouve le General Grant et la partie où se trouve le canyon se trouve une zone qui est classée National Forest est où le camping sauvage est par conséquent autorisé. Nous avons donc dormi dans une belle petite clairière située le long d’une route forestière. Plusieurs emplacements de campings gratuits sont indiqués sur l’application Ioverlander que nous avons beaucoup utilisé aux Etats Unis.
Kings Canyon
Le lendemain nous avons fait la scenic drive de Kings Canyon, une route panoramique d’environ 50 miles. Celle-ci descend dans le canyon tout en offrant de superbes vue sur les montagnes et quelques arrêts pour aller voir des cascades. La route est belle mais si vous êtes limité par le temps, nous conseillons d’aller voir en priorité les séquoias géants de Sequoia National Park et de la partie Grant Grove de Kings Canyon National Park.
Sequoia National Park est aussi spécial pour nous car après avoir passé presque deux mois en Californie, dans des coins sauvages et reculés de la Sierra Nevada, nous n’avions pas encore vu un ours. Pourtant ce n’est pas les mises en garde qui manquent. Partout les bears box sont installées pour éviter que ces animaux dont l’odorat est 7 fois supérieur aux chiens policiers, ne viennent ouvrir votre porte de voiture et se servir dans vos réserves de nourriture. Et c’est alors que nous commencions à douter de leur existence que nous croisons le chemin d’un ours noir sur le Congress Trail à quelques centaines de mètres du General Sherman.
Ce sont les pommes de pins géantes, non pas des séquoias (qui sont relativement petites), mais des Sugar Pines qui le préoccupait plutôt que les randonneurs et on a dû passer pas mal de temps à l’observer avant de croiser son regard. Finalement l’intérêt pour la randonnée initialement prévue c’est vite effacé derrière celui de l’ours et nous avons bien passé deux heures à l’admirer.
Après cette découverte du sud de la Sierra Nevada, nous avons fait une petite pause nature et escalade en rejoignant des amis à San Francisco. Cette escale à aussi été un bon tremplin avant de visiter quelques sites à l’est de la Sierra Nevada : Emigrant Wilderness et Yosemite National Park.
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